Entrepreneuriat : « La prévoyance professionnelle couvre l’artisan mais aussi sa famille » (2/3)
Carole Riche est conseillère à la Mutuelle d’assurance des professions alimentaires. Elle détaille les points essentiels à prendre en compte lors de la souscription d’un contrat et donne des conseils en matière de prévention des risques.
Être travailleur indépendant oblige à être vigilant à sa couverture en termes d’assurances, à la fois pour protéger son entreprise et soi-même ainsi que sa famille en cas d’accident ou de maladie. Mais, faute de temps ou de réelle prise de conscience des risques encourus, certains artisans négligent de souscrire un contrat qui correspond bien à leur activité. Entretien avec Carole Riche, conseillère Vosges et Haute-Saône pour Mapa Assurances, mutuelle d’assurance des professions alimentaires.
La Toque magazine (LTM) : À quoi faut-il être vigilant lors de la rédaction d’un contrat d’assurance ?
Carole Riche (CR) : Le contrat doit bien coller à l’activité de l’artisan : déclaration de la bonne surface, du vrai chiffre d’affaires, des équipements et du matériel en place, avec une durée ajustée au mieux. Car souvent, les compagnies d’assurances manquent d’experts et, en cas de sinistre comme un incendie, il peut se passer beaucoup de temps entre l’intervention des dégâts et la reconstruction : souvent plus de douze mois. L’artisan risque de se retrouver non couvert. Surtout, il faut veiller à ce que les contrats soient revus, réajustés au moins une fois par an pour que tous les éléments soient corrects. S’il y a agrandissement, par exemple, si le chiffre d’affaires augmente, il faut aussitôt modifier les données. Malheureusement nous, assureurs, courons constamment après les artisans. Un professionnel doit s’octroyer une demi-journée par an avec son assureur pour faire le point.
LTM : Les tarifs peuvent-ils être un frein ?
CR : C’est vrai que les tarifs n’arrêtent pas de grimper, quelles que soient les compagnies d’assurances. Avec aussi des franchises qui augmentent. On peut estimer à 2 500 euros le coût d’une assurance multirisque pour une structure moyenne de 500 000 € de chiffre d’affaires sur 200-300 m2. Mais, comme pour les habitations, nous sommes là pour envisager avec nos clients les risques encourus et adapter les niveaux de franchise.
LTM : Quels conseils donneriez-vous en matière de prévention ?
CR : La boulangerie-pâtisserie est une activité à risque, notamment en matière d’incendie. Tout d’abord, bien vérifier les extincteurs. J’ai eu il y a quelque temps le cas d’un départ de feu sur le tableau électrique du four ; s’il n’y avait pas eu d’extincteur proche, ça aurait été la catastrophe ! Il faut aussi bien faire nettoyer le système de ventilation, les bouches d’évacuation, en raison des poussières induites par l’activité. Surtout, être vigilant sur le four. Le faire nettoyer au moins une fois par an par le fournisseur. En revanche, concernant les cambriolages, il est difficile de se prémunir. Il y a une recrudescence des vols sur les caisses automatiques : j’ai un artisan qui a été vandalisé quatre fois de suite ! Ce sont des machines qui coûtent très cher — entre 10 000 et 40 000 € —, alors nous conseillons de les vider systématiquement le soir ou de les laisser ouvertes avec quelques billets dedans. Les cambrioleurs n’hésitent pas à fracturer tout le comptoir pour s’emparer du contenu, autant limiter les dégâts. La télésurveillance, les systèmes d’alerte sur les téléphones portables, pour surveiller la chaîne du froid notamment, se développent aussi.
LTM : Qu’en est-il de la prévoyance ?
CR : Lorsqu’on est travailleur non salarié, les indemnités versées par le régime obligatoire ne sont généralement pas suffisantes pour faire face. En cas de maladie, les indemnités journalières équivalent à la moitié de ce que touche un salarié. En cas d’invalidité, c’est trente pour cent. D’où l’importance de souscrire des contrats dits de prévoyance professionnelle, qui permettent de compléter ces montants. Ils couvrent l’artisan lui-même mais aussi sa famille. Ils permettent, par exemple, de payer le salaire d’un employé si l’on se doit se faire remplacer. J’ai malheureusement eu le cas d’un artisan à qui j’avais fait un devis et qui n’avait pas pris le temps de l’examiner. Six mois après, il a été atteint d’un cancer foudroyant. Il a dû liquider son fonds, se mettant lui et sa famille dans une situation vraiment difficile. Il m’a dit : “Si j’avais su…” Les boulangers-pâtissiers ne s’arrêtent pas pour un rhume. Mais quand la maladie frappe lourdement, il est parfois trop tard.
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